Justice transitionnelle:
pas de retour en arrière !
Après la révolution, la Tunisie a de suite adopté des mesures qui visent à la recherche de la vérité et aux réparations des victimes de l’ancien régime. Ainsi, ont été créées deux commissions nationales, l’une chargée d’enquêter sur les exactions et violations commises au cours de la période allant du 17 décembre 2010 jusqu’à l’accomplissement de son objet et l’autre chargée de l’investigation sur la corruption et la malversation commises entre le 7 novembre 1987 et le 14 janvier 2011. Aussi, le premier décret-loi après le 14 janvier 2011 avait accordé une amnistie aux prisonniers et aux personnes poursuivies sous l’ancien régime pour des raisons ayant une certaine connotation politique.
D’autres mesures de justice transitionnelle se sont suivies avant l’adoption de la loi relative à la justice transitionnelle, mais ces initiatives étaient dissociées, ponctuelles et ne rentraient pas dans un cadre global.
A la suite d’un processus participatif impliquant les acteurs de la société civile, il a été adopté en décembre 2013 une loi organique n°53 relative à l’instauration de la justice transitionnelle et à son organisation qui œuvre à examiner les violations graves des droits de l’Homme commises entre juillet 1955 et la date de la promulgation de cette loi. Ce processus de Justice transitionnelle a été confirmé dans la Constitution tunisienne qui engage l’Etat à veiller à l’accomplissement de ce processus dans tous ces domaines.
Des entraves à la justice transitionnelle
Malheureusement, les entraves à ce processus ont été constatées depuis le début de la mission de l’Instance Vérité et Dignité (IVD) dont les membres ont été élus pour un mandat de 4 ans prolongeable d’une année conformément à la loi n°53.
L’IVD a reçu plus de 62 720 dossiers à traiter mais malgré les obligations et garanties de loi 53, les autorités n’ont pas facilité le fonctionnement de cette Instance, ne lui permettant pas l’accès à certaines données telles que les archives des administrations notamment celles du ministère de l’Intérieur ou des affaires enrôlées au sein des tribunaux notamment militaires. Par ailleurs, une loi de réconciliation économique dans le domaine administratif avait été adoptée en 2017 malgré ses dispositions contraires aux étapes du processus de justice transitionnelle tel que l’encadre la loi n°53.
Loi organique 2013-53, relative à l’instauration de la justice transitionnelle et à son organisation
La Commission de Venise avait considéré que les procédures prévues au sein de cette loi ne présentent pas de garanties suffisantes d’établissement de la vérité ni de publicité et ne permettent pas d’achever un des objectifs les plus culminants de la justice transitionnelle, à savoir la réforme des institutions.
Aujourd’hui des voies politiques s’élèvent pour atteindre plus gravement le processus de justice transitionnelle à travers une nouvelle loi de réconciliation nationale, cette fois ci plus globale, qui viderait la loi n°53 de son sens et qui accorderait via des commissions administratives une amnistie unilatérale aux auteurs des violations graves des droits de l’Homme.
L'Instance Vérité et Dignité
Cartographie des procès
Malgré ces entraves et les tentatives d’interruption prématuré de son mandat, l’IVD a pu achever son mandat au terme prévu, soit le 30 mai 2019, établissant un rapport global sur les violations graves des droits de l’Homme et renvoyant 173 dossiers aux chambres criminelles spécialisées en justice transitionnelle.
ASF considère le processus de justice transitionnelle comme étant une étape primordiale pour la garantie de non répétition des exactions du passé et pour la réussite de la transition démocratique.
ASF s’est investie avec ses partenaires pour la protection et la poursuite du processus de justice transitionnelle. Plusieurs activités au nom de la coalition civile pour le soutien du processus de justice transitionnelle ont eu un large écho et permis d’alerter les autorités, l’opinion publique et les observateurs nationaux et internationaux sur les entraves qui fragilisent le processus
Découvrez les rapports d'observations de procès
Vous trouverez ci-dessous un échantillons des rapports d’observations de procès qu’établissent les observateurs du ROJ, au moment de l’audience, afin de collecter les informations pertinentes à l’analyse de la thématique.